Pourquoi raconte-t-on une histoire?


« Ni one man show, ni travail de conteur, ‘’Tête de Linotte’’ cherche son chemin entre le noir et l’humour »
Philippe Rousseau

Ce texte est un défi intéressant pour le jeune comédien que je suis. Philippe joue ici avec les styles, les mots, les adresses avec une virtuosité qui en fait un texte de ruptures, perturbant pour le spectateur. Le public, méfiant, doit pouvoir suivre ce personnages tandis qu’il se perd, s’évanouit dans le récit selon l’humeur des mots, qu’il plonge entre rêve et souvenir. Je dois donc être un guide discret parmi ce chaos lyrique des frasques d’un homme peu rassurant.

L’écriture de Philippe est libre, folle et poétique, c’est l’écriture de la pensée. Sa simplicité et sa richesse m’ont toujours beaucoup touché que ce soit dans ses spectacles solos ou ceux de la Cie Les Yeux Gourmands.   

Lorsque j’ai repris ce texte il était évident que je devais, avec l’aide de ma complice Claude, trouver “ma” “Tête de Linotte” tout en conservant la particularité de ce texte.

Le principe de spectacle, transportable et jouable dans des lieux de proximité était la base. La réflexion autour du décor était d’avoir le moins d’accessoires possible.

Le personnage pour Philippe était un détenu, pour moi il devint patient d’un CHS, puis tout simplement un homme enfermé. L’idée d’avoir une “scène”, une zone de jeu limité, s’est donc imposée. Elle permet aussi, malgré la proximité du public et les adresses fréquentes du personnage à ce dernier, de marquer une distance et donc favorise le trouble de l’assistance.
Pour que son enfermement ne soit pas que physique mais plus universel, il fallait également qu’on ne puisse pas localiser cette “cellule”. C’est pour cela que le costume du personnage n’est ni celui d’un détenu, ni un pyjama d’hôpital.

En répétant j’ai senti le besoin de donner une place plus particulière à la “femme”. D’abord il y eu un objet fétiche que l’homme manipule de façon maniaque. Puis vint le thaumatrope et la boîte à musique. Le thaumatrope représentait ce mouvement qui semble avancer mais qui reste sur place comme une idée qui tourne en rond. La boîte à musique est l’ultime objet qui représente la femme, le dernier souvenir ; celui de sa voix. Sa voix qui prévient le public avant le spectacle, et sa voix qui maintient le doute sur la vérité de toute cette histoire!